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Courrier des Lecteurs

2011 - saison 3/3

 

 

5/8/2011 - C.C-D

Brou de noix comme fond

 
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CCD : Je viens de consulter votre site à la recherche de conseils avec la peinture brou de noix et je n'ai pas trouvé de réponses. Peut-être pourriez-vous y remédier ?
Ma question :
Est-il possible après avoir appliqué du brou de noix en peinture de fond sur du bois, peindre à l'huile "artiste" par-dessus ?
En fait, j'ai réalisé au graveur sur du bois un motif et je souhaiterai y mettre un fond en brou de noix et peindre ensuite à l'huile mes motifs. Est-ce possible ?
 

 

 

 

Dtp : Attention, il faut absolument être sûre qu'il s'agit bien de brou de noix car très souvent, on vend sous cette appellation d'autres produits, auquel cas il faut renoncer car on ne sait pas ce que c'est.

 

Concernant le vrai brou, il est nécessaire soit de le mordancer (alun), soit de le lier. Le produit dont vous disposez a peut-être été préparé, il vaudrait mieux savoir comment le cas échant.

Mais parlons d'abord des propriétés chromatiques pour approfondir et élargir un peu le sujet.

 

 

Est-ce bien du brou de noix ?

 

 

Contenant de l'inositol (un isomère cyclique qui n'est autre qu'un tanin que l'on trouve dans le vin et dans notre propre corps qui en secrète quelques grammes par jour, dit-on) et différentes variantes de juglon (ou juglone, une sorte de double cycle benzénique complètement hydroxydé), ses principes colorants sont assez strictement organiques (C, O et H).

Il a relativement bonne presse mais il ne faut pas imaginer qu'un tel colorant soit éternel. Ce n'est pas de la pourpre !

 

François Perego indique dans son Dictionnaire que l'opinion des teinturiers changea grandement au fil du temps : « (...) un règlement des drapiers de Reims de 1340 en interdisait l'usage pour la teinture, mais J.B. Colbert le fit placer parmi les teintures grand teint (ordonnance de 1671). » (p. 141). Comprenne qui pourra. Sans doute les procédés de préparation ont-ils varié. Cela doit nous inciter à veiller sur ce point.

 

 

 

Tanins organiques

 

 

La préparation peut en effet s'effectuer de plusieurs manières. Nous en citerons deux, il doit en exister cent ou mille, depuis le moment où l'on a constaté que le brou a tendance à tacher un peu les doigts.

1. la plus simple, mais ni confirmée ni approuvée : laisser au sol la noix tombée de l'arbre en octobre et la récupérer en mai. L'écale est censée avoir séché et tomber en poudre. En réalité, le plus important n'est sans doute pas la pulvérisation mais plutôt l'oxydation qui a lieu pendant le séchage et qui permet de faire passer cette substance du vert au rouge ou au brun voire au noir. Il est possible également qu'une fermentation ait lieu pendant cette période de sept mois.

 

En mai, donc, on fait bouillir les écales dans l'eau durant quelques heures (une infusion ou une décoction laisseraient les molécules plus intactes). Puis trouver un liant (aqueux ou émulsionné) ou un mordant selon l'usage. Une autre possibilité est de couvrir la surface "peinte" avec un liant (cire, huile) ou un vernis.

 

2. (source F. Perego, qui ne précise pas à quel stade on récolte, peut-être à juste raison car on ne désire pas nécessairement obtenir un seul et unique résultat).

On couvre à peine l'écale (les feuilles aussi peut-être, il ne précise pas) d'eau et on laisse fermenter « plusieurs années ou beaucoup moins longtemps à une douce chaleur ». Cela représente une forte différence ! Certainement existe-t-il une raison à cela.

 

Quoi qu'il en soit, pourquoi une fermentation ? L'écale contient un glucoside, le 1,4,5-trihydroxynaphtalène (dit aussi α-juglone ou quelques produits avoisinants). Donc un sucre associé à autre chose, qu'une sympathique et laborieuse bactérie, une levure, va se charger de dissocier en produisant à partir du sucre un alcool et du CO2, car la fermentation, c'est ça (lien).

Cette fermentation permet peut-être de rendre la juglone et ses cousines un peu plus concentrées ou plus stables... difficile à dire mais effectivement, en faisant fermenter le jus de raisin, on recycle les sucres et in fine, on isole/concentre les tanins. Cela donne le vin. La transformation est absolument majeure.

 

 

La préparation est un processus biochimique relativement lourd

 

 

A propos d'alcools, notons au passage que André Béguin signale dans son Dictionnaire (T.1, p. 221) que l'on fabrique également une liqueur de brou de noix. Une simple recherche Google confirme cette information. Le noyer est décidément un végétal formidable. On en fait des huiles, des teintures, des peintures, on en fait de beaux meubles, on le mange, on le boit...

 

 

F. Perego n'indique malheureusement pas de quelle levure il s'agit dans le procédé qu'il expose ni s'il faut une sorte de "mère" (voir mère de vinaigre) ou de "levure de boulangerie". Il termine en précisant que l'on peut faire réduire la décoction à feu doux, mais que de toute façon on obtient un résultat beaucoup plus sûr avec des oxydes de fer ou certains azoïques. Nous ne confirmons pas du tout cette information concernant les azoïques.

La réduction "comme en cuisine" peut éventuellement aider à chasser l'éthanol s'il en reste. On peut aussi bien laisser le liquide s'éventer à froid, étant donné la pression de vapeur de l'alcool (2,5 fois celle de l'eau). Quant à l'eau, on suppose que l'on n'en a pas tant mis au départ ! Et au pire il suffit de la laisser s'évaporer.

Pour en savoir plus il faudrait sûrement lire Dominique Cardon, ou bien effectuer une batterie de tests de longue durée.

 

 

Noyers dans l'alcool

 

 

Donc de toute façon on obtient d'une manière ou d'une autre une sorte de concentré de tanins qu'il vaudrait mieux ne pas chauffer outre mesure lors de la préparation si l'on veut garder quelques assemblages moléculaires intacts. En effet, nous sommes en présence d'une chimie très fine, très compliquée.

 

 

On ne sait pas tout du brou de noix

 

 

L'inositol semblerait jouer un rôle très important dans la formation de polymères (de gros polymères biologiques) selon des études récentes (des années 10) dont il n'est pas difficile de trouver la trace sur le réseau.

 

Quant au juglon (ou juglone), il est sur la sellette, tantôt considéré comme une prometteuse substance anti-cancéreuse, tantôt comme poison (plutôt dans la littérature américaine, comme toujours). Un sujet pointu en biochimie.

 

Donc dire "le brou de noix, on ne sait pas encore très bien comment ça marche" est un euphémisme.

 

 

Même sans aller aussi loin, en guise de conclusion, avant d'appliquer une peinture au-dessus de votre brou de noix il faudrait vraiment établir de quoi il est composé. Et surtout à quel produit il est associé : mordant ou liant, lequel, ou bien ni l'un ni l'autre. Vous pouvez réaliser quelques essais sur des échantillons, ou bien trancher la question en substituant au brou une peinture plus standard, compatible avec celle que vous souhaitez appliquer au-dessus. En fait c'est certainement la meilleure solution, même si elle n'est pas aussi poétique. Mais il faut être clair : avec un brou indéterminé il vous faudra beaucoup de temps et d'efforts pour savoir à quoi vous en tenir.

 

 

Un sujet dans le vent et même plutôt "hi-tech" en biochimie.

 

 

Habituellement de nos jours, le brou de noix n'est utilisé que pour les études ou la décoration et malheureusement on a tendance à le confondre avec une encre ou une teinture alors qu'il n'est (produits commerciaux mis à part) qu'un concentré de tanins. Comme du thé ou du vin.

 

 

Ce n'est ni une encre ni une teinture

 

 

 

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