Les
autres huiles
Certaines huiles aux propriétés très
intéressantes ne trouvent pas d'application massive en arts plastiques et domaines
proches. Quelquefois, pourtant, il semble que toutes les voies n'aient pas été
véritablement explorées.
La standolie ou stand-oeil
Elle est traitée dans la section des produits auxiliaires manufacturés. Lire
l'article.
L'huile
de lin cuite De rares fabricants proposent parfois ce produit
sous un nom qui ne
laisse pas de nous consterner : "huile de lin bouillie".
La hantise des anciens maîtres, ceux
qui mettaient au point des procédés de cuisson quasi alchimiques dans
le but de purifier leurs huiles à peindre, était précisément de
franchir le cap irréversible de l'ébullition, après quoi le produit
obtenu était considéré comme impropre à la peinture.
En fait, heureusement, il ne s'agit, dans ces appellations étonnantes, que
d'erreurs de communication, voire de traduction. Ces huiles "bouillies" ne sont rien d'autre
que des "huiles cuites".
Qu'entend-on par cette appellation, "huiles
cuites" ? On évoque un procédé très simple : ces huiles de lin sont
réchauffées à une température tantôt élevée (traitement à l'ancienne),
tantôt relativement modérée pour éviter un brunissement excessif -
cependant, les huiles cuites sont quand même toujours assez brunes.
Pendant la cuisson, on adjoint souvent une quantité variable mais généralement
très faible de litharge.
On obtient ainsi une huile plus siccative. |
Sommaire
La standolie ou stand-oeil
L'huile de
lin cuite
Les huiles "soufflées"
Les huiles pour encres d'imprimerie
L'huile de copahu
ou baume de copahu
L'huile de
girofle
L'huile d'oeillet
L'huile d'oeuf
L'huile de graines de soja
L'huile de
tournesol
L'huile de chanvre, les
huiles de poissons des profondeurs, les huiles à oméga 3
L'huile de
bois de Chine
Les
huiles de
sésame et de colza
L'huile de
noix de coco
L'huile de
castor
L'huile de
palme
L'huile de
Canton ou de toung (page séparée)
L'huile d'olive (in courrier des Lecteurs) |
Rien n'empêche de réaliser soi-même une préparation à la litharge au bain-marie
(en manipulant ce produit toxique avec d'extrêmes précautions). On n'obtient
pas, par ce procédé à basse température, une véritable huile cuite, mais bien
une huile siccative qui aura l'avantage d'être plus claire et l'inconvénient
d'être chargée de plomb.
-> Lire absolument un passage
dans l'article sur la cuisine des huiles ainsi qu'un texte
sur la litharge dans l'article Siccatifs

Il
existe donc un gros inconvénient à ces huiles cuites : elles contiennent du plomb,
élément dangereux pour le vivant. La quantité de litharge détermine
directement la nocivité, voire la toxicité de ces "huiles cuites", mais aussi leur
efficacité et les interactions possibles dans la peinture (incompatibilités). Dans l'offre
commerciale, cette quantité n'est jamais spécifiée à notre connaissance, ce
qui rend ces produits pratiquement inutilisables, sauf
information séparée (brochure du fabricant, indications éclairées d'un
professionnel ayant vraiment expérimenté le produit concerné) ou longues
expérimentations.
En théorie, une huile cuite peut
être employée
- comme adjuvant, à l'instar d'une huile simple
utilisée conjointement à de l'essence et autres produits pour réaliser un médium
à peindre ;
- comme liant, si la quantité de
litharge et la coloration ne sont pas trop importantes.
Nous ne pouvons pas fournir une opinion
univoque et définitive concernant ces produits. La seule chose certaine, c'est
que le plomb qu'ils contiennent n'est une substance anodine à aucun point de vue.
Note
: on signale l'existence dans le monde anglo-saxon de produits vendus sous
l'intitulé d'huile cuite, en réalité composés d'huile de lin dite
"soufflée". Voir paragraphe ci-dessous.
Les
huiles "soufflées"
(dites aussi "huiles
oxydées" ou improprement "huiles cuites")
De nombreuses huiles sont
traitées industriellement par oxydation, souvent - mais pas toujours - dans le
but de les rendre plus siccatives. On leur reproche cependant d'être assez
sombres. Nous ne sommes pas en mesure de confirmer cette opinion (tout
témoignage sera bienvenu). Bien que celle-ci soit plausible, il ne serait
pas très juste de l'en blâmer davantage que tout autre huile cuite.
Le
procédé est en fait assez classique dans le sens où il s'agit comme toujours d'une cuisson (voir ci-dessus
Huiles cuites). La particularité de ce
traitement est la mise en présence de quantités supérieures d'oxygène.
Des
variétés plus ou moins siccatives, parfois même saturées, sont employées dans
différents secteurs industriels.
Il est possible d'opérer une gélification de
l'huile de lin par ce procédé (dont nous ignorons la recette).
Les huiles
ainsi traitées peuvent être :
- bien siccatives --> lin, graines de soja
-
plus saturées ou presque complètement saturées --> colza, poisson, ricin.
Les
huiles pour encres d'imprimerie
Il s'agit de mélanges et
parfois d'émulsions.
On mentionnera la présence d'huiles
soufflées (notamment
une huile de lin, une huile de colza légèrement insaturée et une huile de ricin)
dans certaines de ces encres.
L'huile
de copahu ou baume
de copahu
de copa-ü, mot tupi du
Brésil.
Oléorésine de divers copayers
(copahu, para et angostoura, grands arbres des zones tropicales d'Amérique et d'Afrique),
anciennement utilisée en médecine. C'est une huile
mi-siccative mi-volatile.
Elle n'a
pas bonne presse. Citons Xavier de Langlais :"Elle
sèche par le fond au lieu de sécher par la surface. De ce fait elle semble
moins siccative mais elle finit par former une pellicule dure et cassante.
L'opinion de la plupart des peintres (dont Yvan Thièle qui l'a utilisée
durant de longues années) lui est défavorable."
Notre opinion :
Le caractère dur et cassant de ce produit est courant pour
une oléorésine. L'erreur d'Yvan Thièle (s'il en a fait une) était peut-être
d'avoir voulu s'en servir comme d'un liant pur ou comme adjuvant trop
concentré. Il n'est pas exclu qu'un produit siccativant "par le fond"
puisse apporter un plus à certaines préparations, utilisé en petites
quantités à l'instar du baume de Venise. C'est en
tout cas un axe de recherche à ne pas négliger a priori car
cette propriété de siccativation est pour le moins exceptionnelle.
Toute
expérience de cette huile nous intéresse. Merci de nous
en informer.
L'huile
de girofle
Nous
savons d'elle qu'il s'agit en principe d'une huile mi-siccative mi-volatile. En
principe seulement car il pourrait s'agir de plusieurs produits.
Un témoignage que nous avons recueilli (qui n'est pas validé à ce jour mais
semble crédible)
spécifie qu'elle aurait des vertus fongicides et aurait été utilisée au
Moyen-âge à cet effet, en très petites proportions dans une peinture à base
de gomme arabique. Un autre témoignage évoque une capacité de ralentir les
temps de séchage pour les peintures aqueuses.
En fait, il est
possible qu'il existe d'une part une "huile essentielle" de girofle, à savoir
une essence de girofle ("huile essentielle" étant un vocable désuet prêtant
à confusion - lire le début de l'article consacré aux
essences), qui pourrait à la fois être fongicide et "anti-siccative" -
sans parler de ses vertus antiseptiques, anti-inflammatoires, sédatives et
anesthésiques bien
connues des dentistes, ni de ses propriétés gustatives exploitées par les
cuisiniers -, et d'autre part, peut-être, une véritable huile dont à dire vrai nous
ignorons tout.
Toute
information sera bienvenue.
L'huile d'oeillet
Elle est mentionnée par De
Chirico dans un ouvrage de peintre - et non un ouvrage purement technique -,
son Traité de la peinture à l'huile. L'oeillet n'est pas la même
plante que l'oeillette et l'huile d'oeillette n'est pas l'huile
d'oeillet.
Selon nos informations - qui ne sont pas pleinement confirmées à ce
jour -, l'huile d'oeillet permettrait de conserver une pâte fraîche d'une
journée à l'autre. Pour le moment, l'enquête est en cours. Nous pouvons d'ores
et déjà affirmer qu'il n'est pas aisé de se procurer ce produit très mal connu
des peintres.
Par ailleurs, il semble qu'il existe d'une part une huile essentielle d'oeillet,
c'est-à-dire une essence, et une huile d'oeillet
aliphatique. L'existence de la première est confirmée, mais au stade actuel
de notre enquête, notamment auprès d'entreprises industrielles, celle de la
deuxième demeure seulement possible.
L'huile
d'oeuf
Lire
absolument l'article "L'oeuf, la tempera".
L'huile
de graines (ou haricots) de soja
Lire l'article du glossaire consacré au soja.
Elle contient divers éléments dont le phosphore et produit une
lécithine. Lire
passage in Les dialogues de Dotapea, chap. I, A propos des liants.
Elle
est actuellement utilisée par des fabricants de peinture en tube.
Elle aurait d'assez bonnes qualités sur le plan du temps de siccativation,
serait moins colorée qu'une huile de lin moyenne et ferait un bon liant (bonnes
qualités de mouillage) pouvant s'avérer favorable aux émulsions.
Elle contiendrait 50 à 60% d'acide linoléique et
des proportions variables d'acide
linolénique,
d'acide oléique et d'acides gras saturés.
Assez étonnés que si peu d'auteurs l'évoquent, nous
avons commencé une enquête sur ce produit.
L'huile
de tournesol
Surtout
connue
comme ingrédient culinaire en Europe occidentale, l'huile de tournesol aurait
été employée en Europe de l'Est (Russie notamment) comme liant à peindre au Moyen-âge
puis comme vernis pour les icônes.
Elle
est commercialisée en France par différents fabricants (nous
contacter). D'aucuns spécifient que cette huile, au lieu de jaunir en
vieillissant, blanchit (information non confirmée). Pour cette raison, ils conseillent son emploi
pour les blancs (spécifiquement le blanc de plomb,
mais aussi le blanc
de Jupiter) et les bleus. Il existe également des versions cuites à la litharge.
A priori, on pense que
l'huile de tournesol est trop saturée et
que c'est sans doute pour cette raison que les peintres occidentaux ne s'en sont pas servi
: elle ne siccativerait pas.
Et bien non, c'est faux : en plus d'une
faible proportion d'acides gras saturés et des habituels acides
oléique
et linolénique,
elle contiendrait 60 à 70% d'acide linolénique, une
quantité remarquable !
Cependant, il existe une huile de tournesol dite "oléique" qui est beaucoup plus
chargée en acide... oléique (plus de 80%) et beaucoup moins en acide linoléique
(environ 10%). Aussi est-il prudent de bien se renseigner sur ce genre de points
avant d'utiliser le tournesol.
Les intersections
cuisine/peinture
Signalons pour terminer qu'il est impossible d'ignorer les vertus à la fois
gastronomiques et plastiques de cette huile et de ses dérivés, la mayonnaise
notamment. Ce n'est pas un détail amusant : cela ouvre de réelles possibilités
artistiques, notamment - mais pas exhaustivement - parce qu'il y a là une
possibilité de consommation d'une peinture (si elle est assez fraîche et si le
pigment est lui-même consommable, ce qui est le cas, par exemple, du
curcuma).
Lire le passage consacré à la "peinture à la
mayonnaise" in L'oeuf.
L'huile de chanvre, les huiles de poissons des profondeurs, les huiles à
omega 3
Ces huiles
contiennent des ALC (le chanvre contient plus de 20% d'acide alpha linolénique
- un oméga 3 -,
variété identique à celle que l'on trouve dans l'huile de lin) et devraient peut-être pouvoir être
utilisées en peinture. En tout cas, elles méritent des expérimentations.
Cependant, nous ne disposons pour l'heure ni d'échantillons, ni de
témoignages à leur sujet.
Les huiles de poissons des profondeurs (ou des mers froides) sont
particulièrement insaturées. L'étude de leur comportement en peinture
pourrait donner des résultats étonnants mais pas forcément très bons.
Autres huiles plus prometteuses contenant des oméga 3 typiquement végétaux
(vraisemblablement de l'acide alpha linolénique) à l'instar du chanvre :
l'huile de bourrache et l'huile de pépins de
cassis.
Enfin, de nombreuses variétés végétales donnent des huiles chargées d'acide
linoléique (oméga 6). Il en est question un peu partout, sur cette page et dans
l'ensemble de la section "Les huiles". Certaines méritent probablement que
l'on s'y intéresse comme l'huile d'onagre et l'huile de germes de maïs, par
exemple. N'hésitez pas à nous contacter si vous
disposez d'information à ce sujet.
L'huile
de bois de Chine
Cette appellation, parfois réduite à
l'expression "huile de bois" est d'un grande imprécision. Plus encore,
elle est probablement erronée car ce terme désigne une variété d'aleurite en
provenance d'Asie centrale (cf.
passage in Les huiles de noix).
Certains fabricants proposent des produits (adjuvants
pour peinture à l'huile apportant brillance et résistance à l'humidité) où
elle apparaît conjointement à de la standolie -
noter qu'il existe aussi une huile d'abrasin polymérisée.
"C'est un vernis pour le cuir", nous dit un professionnel de la
restauration de peintures
sur cuir travaillant pour les Monuments Historiques.
"Je ne connais
pas cette huile", nous dit un intervenant spécialisé chinois connaissant
pourtant bien les produits de ce type.
Précisément, l'utilisation de différentes oléorésines
pour la réalisation de laques en Asie est mentionnée par plusieurs auteurs et professionnels.
Mais auteurs et professionnels évoquent généralement une huile d'origine
spécifiquement cantonaise aux applications apparemment multiples. Voir absolument Huile
de noix de Canton et huile d'abrasin.
Il semble - ce n'est pas
un cas isolé - que les Occidentaux ont tellement confondu les produits et
altéré les prononciations qu'un natif ne peut les reconnaître.
Des risques
particuliers d'ignition sont mentionnés. Lire
passage
in Huiles.
Les
huiles
de sésame et de colza
Calcinée en présence d'autres éléments,
l'huile de sésame fournit une suie utilisée dans la fabrication de l'encre
de Chine.
Toujours dans ce procédé, elle a pu être utilisée non
cuite comme adjuvant, ainsi que l'huile de colza. Celle-ci contient de l'acide
linoléique et ne peut donc pas être considérée comme
saturée. Elle contient cependant environ 60%
d'acide oléique peu insaturé.
L'huile
de noix de coco
En Polynésie, elle est utilisée comme liant
pour les teintures (art sacré pour certains peuples) et la peinture corporelle.
L'huile
de castor
Elle est mentionnée par Kevin Mac Cloud comme
composant des colorants universels.
On nous signale que "Castor oeil" signifie en anglais "huile de ricin", ce
que confirment effectivement les dictionnaires. Il est très possible que la
bonne traduction du propos de M. Mac Cloud soit donc que c'est l'huile de
ricin qui est un composant des colorants en question, ce qui paraît
probable.
L'huile
de palme
Utilisée en Afrique orientale (entre autres) pour
fixer sur le corps des ocres rouges et d'autres substances rouges, elle est elle-même de couleur rouge. Elle
est extraite du fruit des palmistes, palmiers à huile. Voir
Courrier d'un Lecteur sur le rouge
batéké.
Elle est employée
dans la fabrication de certaines plasticines.
L'huile
de Canton ou de toung
Lire texte in Huile de noix.
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