Dtp : Les
questions simples peuvent faire faire de lointains détours. Il nous a
fallu prendre du temps, consulter, et in fine l'on
n'a toujours pas de solution simple à vous proposer.
Tout d'abord, de quoi la feuille
d'argent doit-elle être protégée ? De l'oxydation et de la sulfuration
(sur la sulfuration de l'argent, à ne pas négliger, lire
passage
in Les dialogues de Dotapea, chap. XIX).
Autre élément du "cahier des charges" :
le produit employé comme vernis doit tout simplement adhérer.
Votre échec avec
l'acrylique peut être dû à une
oxydation (solution aqueuse, microporosité et/ou
hygroscopie éventuelles pouvant aussi
impliquer une sulfuration) ou à un problème d'adhérence car toutes les
acryliques ne sont pas faites pour coller au métal.
La base aqueuse semble en fait une assez
mauvaise idée avec tous les métaux, à ceci près qu'un séchage dans des
conditions normales est assez rapide. Mais on peut imaginer des
rétentions d'eau.
Bien sûr nous avons pensé à un vernis
gras. Mais avant d'y venir, ouvrons une parenthèse.
Cela commence
par l'appellation "métal précieux" ou aussi bien "métal noble".
L'argent en est-il un ? Personne ne semble pouvoir se prononcer parce
que ce ne sont pas des appellations strictement définies [1].
Et pourtant, on emploie communément ces
termes pour désigner des métaux peu oxydables, à tort ou à raison.
C'est sur ces points que l'affaire
bascule : en y regardant de près, on s'aperçoit que l'or peut perdre
jusqu'à 7 électrons là où l'argent n'en perd au plus que 3 !
A priori un pied-de-nez à la réputation
de l'or, censé très peu oxydable, et même quasiment inoxydable. Cela dit, la
capacité d'un métal à s'oxyder facilement et son degré maximal
d'oxydation ne coïncident peut-être pas forcément. A tout le moins,
cela semble poser question.
Je laisse
Jean-Louis, qui a interrogé
des collègues physico-chimistes, développer le sujet :
* (...)
On ne sait pas pourquoi l'or et l'argent n'ont pas les mêmes
réactivités chimiques, bien qu'ayant des structures électroniques
très similaires. (...)
* L'oxyde
d'argent le plus courant (et même commercial) est Ag2O,
il est insoluble et brun-noir. Utilisé entre autres dans les piles à
l'oxyde d'argent.
* Je n'ai pas réussi à trouver si cet
oxyde est facile à former ou non.
Divergences chez mes collègues, les uns disent oui, à l'air et à
température ambiante, d'autres disent non.
Un site web dit que c'est spontané à l'air ambiant :
lien.
Celui ci dit le contraire :
lien
(en bas à droite du texte encadré). (...)
* Pour
expliquer les différences de réactivité entre Au et Ag ils parlent
même d'effets relativistes....
Vous voyez ce que je voulais dire au
sujet des questions simples qui peuvent emmener loin.
Revenons aux vernis gras.
S'il est relativement facile d'oxyder
l'argent, ils sont à déconseiller car ils pourraient devenir agents
d'oxydation lors de la
polymérisation.
Certaines solutions relevées par
ailleurs semblent assez discutables, comme le nitrate de cellulose
(qui serait explosif, pas forcément efficace, très
hygroscopique et de
toute façon pas adapté au cas que vous soulevez) ou d'autres qui ont
plus de chances d'aboutir mais nécessitent le vide (couche d'oxyde
d'aluminium ou de titane).
Jean-Louis indique un brevet (US
4,407,875 consultable
ici). Une solution en deux parties dont une hors-sujet puisqu'elle
est destinée à être retirée, l'autre pourrait être plus intéressante.
C'est un vernis relativement classique de type émulsion
vinylique et
glycérophtalique où
l'éthanol est assez présent, de même
qu'un produit toxique encore très répandu, le
xylène.
Alors, un produit à dominante vinylique
dans une solution non-aqueuse serait la solution ?
Selon nos constatations, certains
produits vinyliques semblent poser quelques problèmes de brunissement.
La question de la coloration éventuelle du
polyuréthane que vous évoquiez ne semble pas tout à fait réglée
non plus.
En ce qui concerne la feuille d'or
utilisée à l'extérieur on ne vernit pas, on remplace tous les dix ou
vingt ans. On peut ajouter que sans être un grand toxique au-delà du
fait que c'est un métal lourd, l'argent n'est pas un métal aussi
parfaitement sain que l'or.
Comparer les articles du Reptox
québécois :
ici, l'or,
là l'argent. La différence dans les incompatibilités et en
toxicologie est substantielle.
A vous de déterminer donc en fonction de
ce que vous voulez faire s'il est absolument nécessaire de vernir.
Vous pouvez également prendre conseil auprès de doreurs
professionnels.
La dernière indication que nous pouvons
vous donner est que des tests sont indispensables. Jean-Louis est
partisan d'un vernis gras, je ne prends pas parti mais nous sommes
d'accord sur ceci : "Les essais préalables seront impératifs... Et
éventuellement simuler un vieillissement en trempant la chose deux ou
trois fois dans un peu d'eau chaude une fois que c'est sec." (JL)
Emmanuel Luc
_____
[1]
Une définition stricte existerait, mais nous la donnons sous réserve
de confirmation : les métaux nobles seraient, parmi les métaux de
transition (cf. ci-dessous), ceux dont l'énergie de première
ionisation est inférieure à celle de l'hydrogène.
Certaines listes de
métaux nobles incluent , l'iridium, l'osmium, le rhénium, le palladium
et l'argent. Il s'agit d'éléments ayant dans l'ensemble une assez
forte électronégativité, qui tiennent donc théoriquement assez bien
leurs électrons et ainsi s'oxydent moins facilement que les autres.
Les métaux de
transition, qui occupent le centre de la table de Mendeleïev, sont les
éléments situés de la colonne 3 à la colonne 12 pour les lignes
centrales (couches 4 à 6).
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