La
cire comme adjuvant
Ingrédient
des médiums pour l'huile
Xavier de Langlais émet la critique suivante : "(...) j'accuse la
cire (en excès) d'empêcher les couleurs à l'huile de sécher vraiment à
fond."
Avant de commenter cette citation, il faut rappeler que la plupart des
oeuvres à la cire dites "du Fayoum", vieilles d'environ 2000 ans,
sont quand même parvenues à nous en assez bon état, sans parler des tableaux
de quelques grands maîtres de la cité des Doges. Un rejet excessif de ces substances (constaté chez certains peintres) serait donc
déplacé. Soulignons donc le "(en excès)" que Xavier de
Langlais prend la peine de spécifier, précisément, dans son accusation.
Mais posons la question suivante : n'y a-t-il pas
confusion entre thermosensibilité et siccativité de la cire d'abeilles ?
L'emploi de plomb siccatif par les anciens maîtres vénitiens
compenserait-il l'hypothétique manque de siccativité des cires ?
Il
n'en est rien. La cire se solidifie en fait
beaucoup plus rapidement que l'huile. Par contre, sa thermosensibilité
peut avoir induit quelques erreurs de jugement, quelques confusions regrettables
entre siccativité et coagulation. Le terme de "siccativité", bien
adapté aux produits oléagineux, ne correspond qu'imparfaitement au séchage des cires qui,
bien avant de s'associer avec tel ou tel élément chimique, se solidifient en
coagulant par le froid. C'est vraiment le point
essentiel de leur "comportement". S'agissant même exclusivement de cires
végétales ou animales insaturées et non de cires
minérales qui ne siccativent pas du tout, la siccativation des meilleurs
produits de ce type n'atteindra jamais la perfection propre aux huiles à peindre
et à l'huile de lin en particulier.
On l'a dit, à la grande époque vénitienne, la
cire jouait en fait principalement le rôle de frein pour certains ingrédients lourds
(à base de plomb).
C'est l'un des faits qui nous permettent d'avancer, expérience à
l'appui, que les cires ont pour
principal intérêt de figer les mouvements mécaniques grâce à une
solidification d'une rapidité remarquable, beaucoup plus rapide que celle de
l'huile.
Nous nous sommes servis de cette aptitude à stopper le mouvement pour
expérimenter une peinture rendue volontairement "difficile", que nous
avons saturée de charges
fragilisantes. Le résultat est extraordinaire même avec des apports minimes.
Par contre, les proportions souvent indiquées pour un médium simple à la cire,
* une part de cire de carnauba
* une à deux part de cire d'abeilles
* vingt parts environ d'essence de térébenthine.
...conviennent à une encaustique à destination purement décorative, mais en
aucun cas à une utilisation en peinture à l'huile. Non seulement la cire de
Carnauba est trop teintée, mais surtout, dans un médium à la cire, seule l'huile
peut compenser la rigidité des cires et aussi, au passage, leur thermosensibilité.
Sans cela, le risque de constater des craquelures - voire des
"fêlures" - est avéré. Après
différents tests et enquêtes, il semble que les cires ne devraient
effectivement être utilisées qu'en très faible quantité
(un trois centième du poids d'huile tout au plus), sauf si le peintre travaille par
frottement à la manière d'un ébéniste.
La térébenthine ne doit pas être considérée comme un additif
déterminant pour une peinture artistique oléo-cireuse, contrairement à ce que l'on
constate en ce qui concerne l'encaustique décorative, destinée à être
apposée en couche très fine sur des supports durs, non sans un énergique lustrage.
La solution idéale pour éviter l'écueil des médiums à la cire trop maigres ou
trop gras est d'employer un
mélange huile / cire comme LIANT et non comme médium.
On dira pour résumer que ces cires,
sans être aussi rétives que la paraffine, ne se
laissent pas séduire facilement, c'est vrai, mais constituent des alliées
remarquables, étonnantes, irremplaçables, dès lors que le peintre a
déterminé la juste mesure et la juste application de leur adjonction.
Note : il n'est pas exclu que la cire employée dans le médium vénitien soit
saponifiée (voir cire saponifiée).
Cette solution est d'ailleurs très intéressante mais nous ne l'avons pas testée
à ce jour.
Incorporation de
la cire
Elle doit être réalisée à chaud. Un simple réchauffement à feu doux et/ou au
bain-marie est suffisant.
Composant
de vernis pour la peinture à l'huile
La cire est employée en faible quantité comme agent important pour certains
vernis définitifs MATS. La carnauba, malgré sa coloration, est indiquée en application
en petite quantité sur le vernis final (sec). Elle est utilisée à cette fin par certains
restaurateurs. Cependant, le cas courant est celui du
double vernissage à la cire
d'abeille.
De fait, des accidents liés aux conditions d'accrochage (spots brûlants, trop
proches, soleil) ou de conservation surviennent réellement lorsque la cire d'abeille est employée
pure (voir cire d'abeille) ou en
quantité trop importante. Même la
cire de carnauba, dont la température de fusion est plus élevée, ne met pas
les tableaux à l'abri de ce genre d'accidents.
Conclusion
Le comportement plastique de toute cire doit certainement être associé en
premier lieu au
phénomène de coagulation, indépendamment de toute particularité de
siccativité. La coagulation est extrêmement rapide, ce qui constitue un
avantage unique, mais elle produit toujours une substance
extrêmement cassante et plus ou moins thermosensible.
Comme adjuvant à la peinture à l'huile, la cire doit donc être dosée
"très, très, très léger". Elle est tellement puissante, même en
présence d'éléments très fragilisants, qu'il faut infiniment moins
s'inquiéter d'un risque d'inefficacité sur le plan de la siccativité que d'un danger
beaucoup plus réel d'accident
pictural.
Tout emploi d'une cire comme adjuvant (à distinguer de l'emploi dans l'encaustique),
que ce soit dans le cadre de la réalisation d'un liant, d'un médium ou d'un
vernis, nécessite un dosage particulièrement parcimonieux et quelques tests
préliminaires. A ces conditions, l'emploi de ces produits est à mentionner comme
de loin le plus efficace pour stopper des phénomènes mécaniques comme la
chute des charges ou des plombs.
L'emploi de cire pour rendre une surface plus mate est en général plus
adapté à l'ébénisterie qu'à la peinture (sauf vernis).
Voir aussi charges incolores, les
vernis à la cire, les cires, l'encaustique.
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