JL :
(...) Depuis quelques années maintenant, je peins à l'huile sur toile.
Utilisant une huile A., j'y ajoute afin de varier les rendus de
l'huile de lin et de l'essence de térébenthine. Jusqu'à l'année
dernière, je peignais sur des toiles de coton brut que j'enduisais à
la colle de peau. Depuis peu, j'utilise des châssis préparés, toile de
lin. Autre particularité, j'encadre mes tableaux sous plexiglas afin
de leur donner un aspect froid, photographique. Sur les anciens
tableaux, le plexiglas était disposé au contact de la toile,
dernièrement j'ai opté pour des rehausses, ce qui semble bien mieux
pour la conservation.
Récemment, j'ai été contacté par un ancien acheteur possédant une
toile réalisée il y a trois ans et sur laquelle il a constaté que la
peinture s'était récemment déposée sur la vitre suite à un transport.
Après observation, il lui a semblé qu'elle n'était pas sèche ou plutôt
qu'elle était redevenue collante et fragile, "comme si elle suintait".
Évidemment, ceci est problématique et j'ai du mal à comprendre ce qui
s'est passé. Une peinture à l'huile peut-elle redevenir collante au
toucher après des années ? Du fait qu'elle ne respire pas assez ? Du
fait d'un éclairage trop violent ? S'agit-il d'une réaction chimique
due à une mauvaise préparation ? Est-ce du à un excès d'huile dans
certaines couches ?
Dtp : Oui peut-être. Ce
phénomène est assez étrange de toute façon. On peut s'y attendre avec
une encaustique à cause de la cire. Il est possible également qu'un
excès de cire dans une peinture à l'huile, sous une forme telle que le
médium vénitien, pose ce problème en cas de réchauffement, mais comme
vous ne vous en servez pas, il faut chercher ailleurs en effet.
Même après trois ans, la
siccativation n'est pas forcément
terminée. Dans l'absolu, une toile continue à "bouger" après des
siècles. Pas au point, cependant, de se raviver assez pour faire une
tache. Cela est anormal.
D'une huile à l'autre, il peut y avoir
des écarts sur les durées de siccativation en fonction notamment de
l'indice
d'iode. Il faut aussi tenir compte des réactions, plutôt
variables, des pigments.
Mais parfois, ce sont les pratiques qui
font la différence. En ajoutant de l'huile de lin à votre pâte, à
moins qu'elle soit adjointe d'un siccatif vous ralentissez très
notablement la réticulation. Ou bien
vous fragilisez celle-ci. Il est bien préférable d'utiliser un
médium classique qui sera beaucoup
moins gras, voire même siccatif, que de l'huile diluée dans de la
térébenthine.
Bien sûr on ne peut garantir que le
problème vienne de cela et non de la qualité de l'huile A ou d'autres
facteurs. Mais il faut dire et redire que
l'ajout d'huile dans la peinture à l'huile, c'est trop gras !