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Les dialogues sur la physique-chimie
appliquée aux arts
Chapitre
XIV
triptyque laser et 3d
deuxième partie :
L'holographie
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dial dial
dial
Ce chapitre des Dialogues de Dotapea est le second volet d'un triptyque.
Il s'agit comme dans l'article précédent, consacré au laser, d'une discussion entre Jean-Louis, physico-chimiste au CNRS, et un candide,
Emmanuel. Le chapitre suivant fera intervenir un professionnel de la restitution
tridimensionnelle.
Ici, nous évoquerons les étranges particularités physiques de ce procédé. Les
aspects historiques, les enjeux et l'avenir de l'holographie et des procédés de
restitution immatérielle en trois dimensions seront abordés dans le dernier
chapitre de ce triptyque.
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Sur l'actualité du sujet lire absolument
« Holographie animé en temps réel :
le compte à rebours a commencé »
in « Hi-tech » - cliquer ici
Jean-Louis : Le principe de l'holographie,
en quelques mots. La lumière, c'est un champ électromagnétique. Les
détecteurs usuels (oeil, plaque photo, capteur CCD,...) sont dits
"quadratiques", ils détectent le carré de l'amplitude du champ
électrique, ce qui n'est autre que l'intensité. Intensité d'un champ =
carré de son amplitude, l'amplitude étant la "déformation" associée au
champ que subit l'espace. Tu me suis?
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Emmanuel : Oui, l'amplitude est la hauteur de la vague. Cela
correspond aux schémas de la page "l'onde".
Jean-Louis : La matière, elle, interagit
avec l'amplitude du champ. L'amplitude peut être positive (le sommet
d'un vague) ou négative (le creux). Si on prend le carré, on sait
seulement que le point d'observation s'est déplacé, mais on ne sait pas
si c'est vers le haut ou vers le bas. OK ?
Emmanuel : Oui. Le carré fait perdre le
signe.
Jean-Louis : Donc quand tu prends une
photo, tu enregistres strictement l'intensité de lumière reçue par les
différents points de ton sujet. C'est tout.
Emmanuel : D'accord. Encore un phénomène
que l'on ne perçoit pas !
Jean-Louis : Mais là, nous ne sommes pas
seuls.
Pourtant, si tu pouvais mesurer "le signe" de la lumière reçue par
chaque point, tu pourrais dire que tel point est placé en avant ou en
arrière de tel autre parce que tu saurais que la lumière qu'il envoie
est en avance ou en retard de phase sur l'autre.
Emmanuel : Ah oui !
Jean-Louis : Certes, en simplifiant un peu.
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Question d'amplitude et de phase. Voir la vidéo du chapitre Le laser.
Lien. |
Quand tu roules dans ta
voiture et que la voiture que tu suis passe sur une bosse, tu sais que
tu vas aussi sentir la bosse dans les secondes qui suivent. Tu as reçu
l'information "vers le haut" ou "vers le bas". Si tu ne recevais que
l'information "mouvement", tu ne saurais pas dire si ta voiture va
rouler sur une bosse ou passer dans un trou.
Emmanuel : Tu saurais juste qu'il y a un
trou ou aussi bien une bosse.
Jean-Louis : L'holographie, c'est le moyen
d'enregistrer l'information de phase d'un objet éclairé. On fait ça avec
des interférences, qui, comme tu le sais maintenant
[lien], sont
précisément le résultat de deux (ou plusieurs) ondes qui ont une
relation de phase particulière. En phase : lumière, en opposition de
phase : noir.
L'holographie se fait en
éclairant l'objet avec une lumière cohérente, d'autant plus cohérente
que l'objet est grand ou la profondeur de champ grande. Il faut que la
relation de phase soit conservée entre la lumière qui éclaire le premier
plan et celle qui fait l'arrière plan.
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Les
interférences au secours de nos difficultés à percevoir la phase |
Emmanuel : "Celle qui fait l'arrière-plan"... hmm... Est-ce que
tu veux dire qu'il y a un miroir quelque part plus ou moins derrière
l'objet à holographier pour répercuter la même lumière cohérente par
l'arrière ?
Jean-Louis : Je veux dire que tout le
volume de l'objet doit être baigné par une lumière cohérente.
Emmanuel : Une seule je suppose.
J'imagine les difficultés des éclairagistes !
Jean-Louis : Il n'y a qu'une seule source,
donc effectivement il y a beaucoup d'ombres, mais ça souligne les
contrastes.
Cet objet renvoie de la lumière vers une plaque photo.
Emmanuel : Une seule plaque photo située "vers nous", ok.
Jean-Louis : La lumière venant du fond
arrive plus tard sur la plaque que celle arrivant du devant de la scène.
On a donc des ondes déphasées.
Simultanément, la plaque photo est uniformément éclairée avec un
faisceau cohérent dit "de référence".
Emmanuel : D'accord, ça crée l'interférence.
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Cauchemar de l'éclairage |
Une question en
aparté : là, on doit utiliser des cônes laser assez larges pour couvrir
la plaque et pareil pour l'objet, a priori. Ou bien est-ce que l'on
balaye en s'aidant d'un miroir - mais alors ça complique tout !
Jean-Louis : On doit effectivement élargir
les faisceaux laser. C'est pour ça qu'il faut des gros laser pour faire
des grands hologrammes, l'énergie lumineuse disponible diminue beaucoup
quand on élargit les faisceaux. C'est fait avec des lentilles.
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L'énergie nécessaire du côté des cônes laser |
La plaque enregistre donc les
interférences entre la lumière du faisceau de référence et la lumière
émise par l'objet. C'est l'hologramme. Une fois la plaque développée,
pour lire l'hologramme il suffit de l'éclairer avec un faisceau laser
homogène semblable à celui utilisé pour la prise de vue.
Emmanuel : D'accord. Pas de développement,
pas de tirage, c'est la même plaque.
Jean-Louis : Si, si, c'est une plaque photo
normale, avec temps d'exposition, développement et tout.
Ce faisceau interfère avec "l'image" (en fait c'est invisible, juste des
points noirs par ci par là) sur la plaque .
Emmanuel : Donc les points noirs restituent
les oppositions de phases, c'est ça ?
Jean-Louis : Et les niveaux de gris
intermédiaires, oui.
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La
plaque et l'épreuve holographiques |
Et cela restitue une image de
l'objet. On a l'impression de voir l'objet par la fenêtre de
l'hologramme. Particularité : comme il n'y a aucune lentille de prise de
vue, chaque point de l'hologramme contient toute l'information,
puisqu'il a reçu de la lumière venant de tous les points de l'objet. Si
on casse un hologramme en deux, on peut toujours refaire l'image. Etc...
Simplement, la plaque photo devenant de plus en plus petite, la
"fenêtre" par laquelle on voit la scène est de plus en plus petite. On
perd en luminosité et en angle de vue.
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Chaque point contient toute l'image |
Emmanuel : D'accord.
Une chose me parait un peu difficile à comprendre. Les différences de
phases créent les interférences, ok. Mais question échelle, un objet
moyen, macroscopique, a des dimensions qui dépassent très largement la
longueur des ondes du laser. Le décalage des phases se situe "à
l'intérieur" de cette longueur. Comment deux photons déphasés
peuvent-ils encore donner d'une manière ou d'une autre l'information de
la distance alors qu'il a pu y avoir de nombreux cycles d'écart entre
eux ?
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Question de cycles |
Jean-Louis : Oui, bonne question. C'est en fait parce que chaque
point de l'objet "holographié" devient une source qui irradie et
interfère sur toute la surface de la plaque. C'est pas comme la photo
classique où il y a une relation univoque entre chaque point objet et
chaque point image. "Holographie" = écrire TOUT ou TOUT écrit. Chaque
point objet impressionne toute la plaque, théoriquement chaque point de
la plaque contient toute l'image. L'hologramme est donc l'enregistrement
d'une infinité d'interférogrammes.
Emmanuel : Chaque point de l'objet
impressionne toute la plaque et chaque point de la plaque est une vision
d'ensemble. Comme si chaque point de la plaque était un oeil. Est-ce que
ça veut dire qu'il y a un effet disons plus ou moins stéréoscopique qui
s'ajoute à l'information « phase » indirectement véhiculée par les
effets des interférences, mais insuffisante pour restituer des
informations macroscopiques ?
Jean-Louis : Non, c'est pas de la
stéréoscopie.
Emmanuel : D'accord. Ca semble cependant
avoir un puissant rapport avec quelque chose de topologique.
Jean-Louis : Ca dépend de ce que tu
appelles topologie, sans doute.
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Holo = tout |
Emmanuel : Le fait qu'il y ait plusieurs yeux, plusieurs visions
enregistrées sur la plaque, donc en plusieurs lieux. Est-ce qu'un seul
grain de l'émulsion est capable de reconstituer l'intégralité de
l'information relief ? Si oui, je ne comprends plus du tout ! L'info
phase semble très insuffisante à elle seule.
Jean-Louis : Un seul grain ne suffit pas,
il faut un réseau d'interférences. La phase fait tout, mais c'est codé
sur une surface, pas sur un seul point.
Emmanuel : ouf ! J'ai cru devenir fou.
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La
phase fait tout, mais "codée sur une surface" |
Autre chose : lors de la
projection, il n'y a pas d'écran (alors qu'avec d'autres procédés 3d il
y en a un). Est-ce que l'on peut dire que ça passe de la plaque à la
rétine, des « visions » de la plaque à celles de nos yeux sans
intermédiaire, comme si on court-circuitait quelque chose ?
Jean-Louis : On voit l'hologramme derrière
la plaque, c'est une image virtuelle, comme dans un miroir. Sauf que, la
plaque étant transparente, tu peux mettre ta main dans l'image. Je crois
qu'on sait aussi faire des hologrammes devant la plaque, mais je ne sais
pas comment. Mais on ne sait pas faire des hologrammes "dans le vide",
genre Guerre des étoiles.
Emmanuel : Donc il y a écran. Le relief est
vraiment restitué dans l'air.
Jean-Louis : Non, pas d'écran. Comme une
image dans un miroir, derrière la vitre.
Emmanuel : Mais alors pourquoi cela ne
fonctionne-t-il pas dans le vide ?
Jean-Louis : Non, l'image holographique
peut tout aussi bien être vue dans le vide. Les
miroirs fonctionnent aussi dans l'espace !
Quand je disais "hologramme dans le vide", je voulais dire projeté dans
l'air, dans l'espace, sans support physique. Comme Obiwan Kenobi dans la
guerre des étoiles.
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L'absence d'écran |
Emmanuel : Je ne me souviens plus ! C'est si loin ! Je viens de
prendre un coup de vieux.
Encore une chose en rapport avec le temps et l'espace : dans les années
70, j'ai vu un hologramme intéressant au Musée de l'holographie de Paris
(aujourd'hui disparu).
Jean-Louis : Je l'ai visité, c'était vers
Beaubourg.
Emmanuel : Avant la transformation du
quartier des Halles/Beaubourg, c'était à l'Unesco (Paris VIIème).
C'est assez ancien. Cela remonte à 76 environ.
Ce hologramme qui restituait l'image d'une jolie femme en train de
fumer. En tournant tout simplement autour de l'hologramme, on percevait
parfaitement ses mouvements, les volutes, tout. C'était un véritable
petit film. Prodigieux ! Avec un procédé holographique classique, sans
intervention numérique, on peut donc aussi restituer le mouvement.
Est-ce que l'on obtient ce résultat en plaçant simplement le modèle sur
un plateau tournant lors de la prise de vue ?
Jean-Louis : C'est assez compliqué, en
fait. La scène a été filmée avec des impulsions laser, et entre chaque
flash on faisait un peu tourner la plaque photo. Il y a une autre
méthode où on prend plusieurs hologrammes, un par flash, on les coupe en
bande et on les recolle. Chaque bande restitue sa scène.
Emmanuel : Beaucoup de travail.
Il me semble me souvenir qu'au musée version Unesco, on expliquait que
l'on doit prendre plusieurs vues à cause du fait que l'on n'imprime
jamais à chaque fois que le point de vue de la plaque. Je crois que cela
pourrait correspondre à un passage en italiques d'un
article de Wikipédia : « Chaque fragment de l'hologramme contient
toute l'information de la scène vue de l'endroit où se trouvait le
fragment. »
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Le
musée français de l'holographie a disparu |
A l'inverse, que se
passe-t-il si un plasticien décide de concentrer l'éclairage laser
derrière l'objet et profite des lacunes d'un arrière - ou d'un avant -
mal éclairé ?
Jean-Louis : Profiter des lacunes pour
faire quoi?
Emmanuel : Ne pas présenter juste un objet
bien net mais une scène derrière, à la limite des capacités de
perception de la plaque. Enfin les plasticiens auront sûrement d'autres
idées plus ou moins du même genre, surtout lorsque le procédé deviendra
plus commun.
Jean-Louis : Je ne sais pas si c'est appelé
à devenir très commun. Il faut quand même pas mal de matériel, surtout
pour holographier de grandes scènes. Et la restitution n'est vraiment
bonne que si on utilise un laser, donc ça multiplie les coûts. Si tu
fais une expo avec 5 hologrammes de 50cm X 50cm il te faut 5 lasers à
200 ou 300 kilo-euros pièce, et s'ils tournent tous les jours pendant 1
mois, tu vas avoir de la maintenance...
Emmanuel : La restitution sans laser donc
sans l'info "phase", ça donne une mauvaise image ?
Jean-Louis : Ca peut être plutôt mauvais,
carrément invisible...
Emmanuel : Comme un banal « logo de carte
bleue ». Dommage.
Mais ça veut dire qu'il y a bien un petit apport du seul fait de la
présence d'un réseau de « grains ». Comme tu dis, ce n'est pas une
relation univoque de point à point comme en photo classique. Le deuxième
schéma de l'article de Wikipédia que je citais ci-dessus le fait sentir
intuitivement.
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Un
devenir artistique incertain |
Dernière chose. On a vu que
c'est l'information « phase » qui donne toute la précision du
hologramme. En effet, l'information phase est signifiante sur la
longueur d'un cycle d'onde visible, c'est-à-dire 400 à 800 nm environ. Un atome
mesure 0,1 ou 0,2 nm. Le cycle balaye donc quelques milliers d'atomes,
ce qui est peu. J'ai d'ailleurs entendu dire que l'on s'en sert dans
l'industrie pour vérifier les dimensions d'objets manufacturés ultra-précis.
Et j'imagine que l'on doit savoir réaliser des lasers encore plus fins.
On se dit donc que l'ajustement des appareils doit représenter un
travail gigantesque simplement pour que cela ne bouge pas à la prise de
vue ! Et on imagine un coût pour cela. Pourtant, ne peut-on pas graver
un simple dvd dans son salon avec les enfants, Médor et Minou faisant
les fous tout autour ? Le diamètre du laser dvd est de 650 nm environ,
sa couleur est maintenant bleue ou bleu-violet (plus ou moins autour de
450 nm - voir lien) et
pourtant ça marche.
Donc finalement, tant pour les technologies laser que pour l'holographie
proprement dite, est-ce que la technologie de l'immobilisation n'est pas
un « travail de l'ombre » qui a peut-être nécessité presque autant de
recherches que le hologramme ou le laser eux-mêmes ?
Jean-Louis : Tu as raison, il faut des
tables anti-vibratoires et des labo sans courant d'air. Ou alors il faut
enregistrer très vite, avec un flash laser puissant. Si le laser et le
sujet n'ont pas le même régime de vibration (i.e. ne sont pas sur la
même table), c'est quasi impossible.
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Les
retombées dans la pénombre |
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