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Académies
[accès direct poses académiques]
Il est communément admis que l'académisme ne se borne pas tant à des
choix techniques qu'à une manière d'envisager l'art. C'est dans l'esprit de
l'académisme, par exemple, de proscrire autant
que possible le contour, de travailler
avant tout la valeur, le modelé, à l'aide de couleurs bien définies : noir,
sanguine, sépia ou bistre sur fond blanc, crème ou gris (éventuellement bleuté),
parfois
rehaussé de blanc. La sépia et le bistre sont théoriquement des encres mais
l'emploi à sec est admis. La sanguine elle-même peut être
utilisée sous forme d'encre ou de craie (lire article).
Ce type de dessins, indépendamment
des choix techniques, s'oppose radicalement à l'illustration
(médiévale aussi bien que contemporaine), qui
s'intéresse avant tout à l'impact expressif renforcé par des contours
prononcés facilitant la lecture.
Cependant, entre
- le travail de pur modelé, qui ouvre sur la composition et permet
d'ailleurs de préparer des tableaux
- et la "ligne claire" de la bande dessinée franco-belge
ou aussi bien les aplats colorés des enluminures du Moyen-âge,
il existe un vaste univers qui n'a certainement pas fini d'être exploré
bien que ces questions furent posées dès Lascaux.
De nos jours, de l'expressivité de la ligne au pur travail de composition réalisé au
fusain, il n'y a pas forcément opposition et il existe des expressions
intermédiaires.
Cela n'empêche pas, encore aujourd'hui, que les jurys de certaines écoles d'art perpétuent ou accentuent
même certains choix liés au
matériel proprement dit,
notamment dans le domaine des couleurs. Nous avons par exemple recueilli le
témoignage d'une étudiante recalée à Paris (nous ne citerons pas le nom de
l'école où elle postulait)
pour avoir utilisé des couleurs trop peu académiques malgré un travail
figuratif sans contour, en fait remarquable
et original sans excès d'excentricité. Il s'agissait d'un parfait exemple
d'exploration intelligente de cet "univers" que nous évoquions ci-dessus. Revenons cependant à l'académisme "strict" qui - ne soyons pas injustes -
donne des résultats époustouflants avec très peu de moyens comme dans l'image
ci-dessous, détail d'un exceptionnel travail de lumière et de modelé de Prud'hon
réalisé avec des crayons noir et blanc sur papier originellement bleu. |
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Les poses académiques
Un autre aspect de l'académisme concerne les poses
autorisées aux modèles artistiques. Elles furent limitées à des figures
célèbres - par exemple le discobole - issues de l'art antique.
Cette tradition se perpétue, notamment en
Italie. Ainsi, le logiciel de synthèse corporelle MakeHuman (lien),
dont le fondateur est italien, propose-t-il toujours, y compris dans sa
plus récente version, une bibliothèque de poses de ce type.
Un autre Italien, Modigliani, semble avoir été
le premier ou l'un des tout premiers parmi les artistes latins à rompre
avec la tradition classique afin de travailler sur d'autres expressions
corporelles y compris dans les cadres pédagogiques. |
Evoquons maintenant les techniques proprement dites, les matériaux utilisés pour les
"académies" :
* le fusain et la gomme
mie de pain
* certaines encres : la sanguine,
la sépia et l'encre de
Chine, travaillées à la plume et/ou en lavis
* les crayons de type pierre noire, crayon
fusain, crayon carbone
* les crayons et craies carrées blanche,
sanguine, sépia et ocre jaune à la rigueur
* les mines des mêmes couleurs, éventuellement
mêlées de gomme arabique, comme l'ancienne sanguine
* les crayons noirs, mines de plomb et mines
hexagonales (lire l'article sur les crayons)
* les papiers teintés ou blancs à grain fin :
'C à grain' ®, Ingres et vergés divers, vélins et BFK Rives ® (papiers
destinés à la gravure), papiers pour l'aquarelle, certaines 'Mi-teintes' ®, Accademia ®, etc.
Les couleurs sont généralement soit dans les ocres, soit dans des bleus
gris, soit du blanc.
On retrouve finalement dans les académies à peu
de choses près les couleurs de l'art paléolithique. D'ailleurs certaines
réalisations de cette époque sont pour ainsi dire académiques. Un exemple :
Dans cette tête d'animal à la renverse, en pleine chute (Lascaux), il n'y a aucune
accentuation des contours mais bien des zones savamment estompées. Comme
souvent dans l'art pariétal, la surface est mise à profit à l'instar du
grain d'un papier ou d'une toile dans les pratiques plus récentes. Pensons donc que nos ancètres
travaillaient probablement avec des blocs comme ceux-ci :
(il
s'agit ici de pierre noire, un matériau assez rare)... ou bien,
plus souvent encore, avec des terres réduite en poudre ou des morceaux de
bois carbonisé, parfois un peu de graisse animale, etc.
Mais... et c'est le but de la démonstration, quand ils avaient la chance
de tomber - par exemple - sur un filon de violet de manganèse, ils ne se
privaient pas de s'en servir. Sans cette liberté, l'art aurait-il évolué ?
L'artiste ne doit-il pas être ouvert, ne doit-il pas même s'entraîner à
une ouverture raisonnée ? N'est-il pas important, y compris sur le plan
pédagogique, de mettre en question une conception trop rigide de
l'académisme tant sur le plan des matériaux employés que sur celui des
couleurs là où une évolution sainement ouverte a fait ses preuves depuis des
dizaines de milliers d'années ?
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