La
garance
La
plante et son histoire
Le pigment garance a longtemps été extrait d'une plante
éponyme (voir photo ci-dessous).
La garance (rubia tinctorium) est une herbe
vivace rubiacée (environ un mètre de hauteur) dont le rhizome (80 cm de
profondeur au maximum) contient une substance puissamment colorante
qui donne aux moutons qui la consomment l'aspect de fauves barbouillés de sang.
Curieusement, elle teinte même les os des êtres qui s'en nourrissent (y compris
le bec et les pattes des oiseaux) ainsi que le lait.
Sa fleur est d'un blanc jaunâtre (floraison de mai à juillet), ses fruits
sont de petits "pois" noirs. Elle pousse sur les sols très riches
mais sa racine n'est extractible que lorsque le terrain présente en plus la
caractéristique d'être très léger.
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Sommaire
La
plante et son histoire
Extraction
Synthèse
Toxicité
Le
pigment et son emploi en peinture |
Le terme alizarine désigne selon les sources tantôt la racine, tantôt le
colorant que celle-ci contient et qui se situe dans l'aubier.
Peut-être née en Perse, la garance a été utilisée pour teindre des textiles dès 2000 BC
dans une zone originelle élargie : en Inde,
en Palestine, en Égypte et chez les Scythes au IVème siècle BC. Ne pouvant être cultivée avec les moyens de
l'époque dans la plupart des autres
régions du monde (sauf exceptions, par exemple en Australie où elle fut utilisée
localement pour la peinture traditionnelle), elle a été l'objet d'un commerce intense (exemple : présence de
garance dans une tombe norvégienne du VIIIème siècle BC ou dans le Japon
médiéval, à Pompéi, etc.) car sa beauté et sa
tenue étaient très recherchées tant pour la teinture que pour la peinture et
l'écriture (encres).
Tardivement, la Hollande s'est spécialisée dans cette
culture. Elle n'est apparue en France que dans les années 1760 (Avignonnais,
Alsace).
Il n'est pas exclu que les pantalons garance des soldats
de la 1ère guerre mondiale aient été teints avec une garance probablement
synthétique fabriquée en région alsacienne,
c'est-à-dire allemande à cette époque.
Parmi les colorants végétaux, la garance est l'un des plus permanents,
surtout en tant que teinture.
Elle faisait partie des teintures dites "bon teint"
et permettait également de colorer le cuir (mordant typique : alun).
L'alun apparaît d'ailleurs assez souvent dans les recettes, y compris en
peinture.
Extraction
Le prix relativement élevé de la garance était dû
notamment à la
difficulté du travail d'extraction. Le labeur était rude dans les garancières
: il fallait deux hommes pour extirper la racine de la plante. Celle-ci était
ensuite séchée au soleil, séparée de son écorce, battue et broyée par des
moulins puis tamisée. La qualité du produit obtenu dépendait de la quantité
d'écorce restante (une grande quantité donnait une qualité
dite "robée", mauvaise).
Puis, une opération d'hydrolyse est réalisée afin de
débarrasser les glycosides de leur sucre. D'autres
traitements suivent et il existe différentes méthodes.
La garance contient en effet une importante quantité de
produits colorants, de famille anthraquinonique.
Un point important doit être signalé : la quantité de
composés anthraquinoniques que contiennent les racines de garances est
extrêmement variable en fonction de facteurs tels que l'âge de la plante, sa
variété et la nature des sols. Sans parler du traitement appliqué qui est
déterminant : s'agit-il de destiner le colorant à la teinture ou à la peinture,
de le conditionner avec quels mordants et quels agents réactifs, de quel
"robage" initial s'agit-il. Nous avons pris l'habitude d'une garance
industrielle elle-même hétérogène, mais le traitement traditionnel l'est encore
davantage, partant d'un individu moins contrôlable : la plante.
Pour teindre un tissus, il fallait ajouter à "l'alizarine"
obtenue du calcaire
(craie) et de l'alun, jouant le rôle de mordant.
Mais de nombreuses variantes sont envisageables.
Synthèse
et imitations
En 1826, la composition de l'alizarine est identifiée.
En 1869, Graebe et Liebermann parviennent à créer une alizarine synthétique -
non une imitation. C'est la ruine pour tous les producteurs de garance
naturelle, la fortune pour les industriels.
Le produit de synthèse créé est anthraquinonique.
Aujourd'hui, un mélange de quinacridone et de
dikéto-pyrrolo-pyrrole (PR206) est proposé comme substitut permanent de la
version dite "cramoisie" (alizarin crimson en anglais), très
courante en peinture aquarelle notamment.
Toxicité
Concernant l'alizarine de synthèse et la garance, leur
nocivité
est très faible (problèmes digestifs de courte durée). Les imitations communes ne sont pas non plus signalées comme particulièrement
agressive généralement, mais il peut exister des exceptions.
La garance véritable aurait même réapparu sous la
forme de colorants alimentaires.
Le pigment
et son emploi en peinture
La garance en tant que pigment à peindre est généralement déclinée
aujourd'hui en trois principales teintes :
* la garance rose (d'aspect tantôt blanchâtre,
tantôt très transparent, de composition variable)
* la garance foncée (une couleur de référence sur
la palette)
* la garance cramoisie (en anglais alizarine crimson), aux
riches nuances sombres, très utilisée pour l'aquarelle.
Les cramoisis du passé, réputés violacés, ne ressemblent probablement pas
à ceux du présent, souvent brunâtres (ils contiennent parfois un PBr)
et d'ailleurs fort beaux. C'est
Bourgeois qui a créé cette couleur dès 1816, souhaitant la substituer au carmin
de cochenille.
Une quatrième variété est proposée par certains
fabricants (qui ne spécifient pas sa composition) : un soi-disant "rouge de garance",
en fait un curieux rouge curieusement orangé que nous ne mentionnons que pour mémoire.
Garances et laques de garance sont un même produit de base, transparent par
nature, que l'on peut rendre encore plus transparent à l'aide d'une charge
incolore neutre pour lui conférer
l'appellation de laque. Dans tous les cas, ces produits sont largement utilisés en
glacis. Ils peuvent embellir, voire magnifier des rouges, des violets, des bleus, etc.
Dans un lointain passé, on a utilisé la garance et
le kermès pour compenser le vieillissement de couleurs rouges fugaces comme le
cinabre. Tandis que celui-ci s'assombrissait, la
garance, posée par-dessus et le protégeant, s'éclaircissait doucement.
Lecture conseillée :
La
garance sur Pourpre.com
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