Jean-Louis : C'est à la fois plus simple et plus
compliqué. Il suffit en fait d'une seule charge pour faire un champ
électrique. Deux charges vont créer un champ dipolaire... Un ensemble de
charges va créer un champ qui peut se décomposer en une somme de champs
« simples ». On aura une partie du champ qui sera de type dipolaire, une
partie quadrupolaire, une partie octupolaire, etc... Les contributions
d'ordre supérieur sont de plus en plus faibles et de plus courte portée.
Emmanuel :
Tant de pôles avec deux signes au maximum, c'est difficile à
imaginer. Comme on a l'habitude de se représenter des pôles en référence
à ceux de la terre, là je me représente un champ multipolaire comme ce
que l'on peut imaginer autour d'une planète-patate (n'importe quelle
forme en fonction de celle du corps dont il est question, une molécule
par exemple) avec des pôles + et des - ici et là. Est-ce que c'est
correct ou est-ce que ce n'est pas sur le même plan ?
Conceptuellement c'est peut-être une erreur, ces représentations
planétaires qui évoquent un monde « fermé », typiquement un planète avec
un pôle + et un pôle - et ça boucle. Alors qu'avec la gravitation qui
est unipolaire (enfin je crois), il est plus facile d'imaginer que tout
cela est continu de loin en loin comme de proche en proche.
Dit autrement, on n'a pas tendance à penser qu'un champ gravitationnel
est quelque chose de fini. Qu'en est-il d'un champ électrique ?
Jean-Louis : Si tu mets deux astres près l'un de
l'autre, tu auras un champ gravitationnel dipolaire. Si tu en mets
quatre, il sera quadrupolaire. Pour les molécules, en effet, si leur
forme est compliquée et si il y a des charges un peu partout, le champ
acquiert des moments d'ordre supérieur (quadrupolaires, octupolaires, ...).
Arches solaires
- Image GSFC/TRACE-Nasa
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use NASA imagery, video and audio material
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informational purposes,
including photo collections, textbooks, public
exhibits and Internet Web pages. »
Les champs électriques et gravitationnels sont en principe de portée
infinie. Je dis en principe parce que 1) on ne peut pas vérifier, 2) il
y a évidemment des théories qui disent que la décroissance en 1/r2
n'est plus vraie à grande distance, ça serait notamment un test de
l'existence de dimensions cachées dans l'univers. On essaie de vérifier
ça avec les sondes Voyager qui sortent du système solaire.
Emmanuel :
Donc si je comprends bien, il peut y avoir dipôle sans qu'il y
ait circulation de. quelque chose entre les deux ?
Jean-Louis : Circulation, je ne vois pas ce que tu veux
dire, mais il faut qu'il y ait des lignes de forces ou des lignes de
champ entre et autour des objets.
Emmanuel :
Je regarde les définitions du Robert pour « pôle ». Toutes sont
liées à une dipolarité +/- et la seule qui semble correspondre en partie
à notre propos, c'est sauf erreur celle du sens figuré : « Ce qui
attire, entraîne ; centre d'activité, d'intérêt. » (au détail prêt
que dans certains cas il peut aussi y avoir répulsion).
Jean-Louis : Oui, c'est le plus courant. Les deux
planètes vont créer un champ gravitationnel dont les lignes
ressembleront à celles du champ électrique (ou magnétique) créé par un
dipôle.
Emmanuel :
Fichtre. Ainsi même de la terre à la lune il y a des lignes de
champ comme autour des pôles d'un aimant. on en apprend tous les jours.
Est-ce que un champ unipolaire a des lignes ou est-ce réservé aux champs
« pluripolaires » ?
Jean-Louis : Non, c'est assez universel. Tous les
champs, scalaires ou vectoriels ont des lignes.
Aimant et limaille de fer
- Image
Palais de la Découverte - Paris
Emmanuel :
En fait pour donner une définition synthétique, un pôle semble
être ce qui fait motion, quelle que soit la direction impliquée. Es-tu
d'accord avec ça ?
Jean-Louis : Assez d'accord, oui. Une force d'attraction
ou de répulsion.
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